C’était un jour comme un autre à l’université. Le joueur de baseball qu’était Brendan était sorti de l’entrainement un peu plus tôt, et une fois la douche de prise il quitta les infrastructures sportives pour rejoindre le parking. La journée avait été suffisamment éreintante pour qu’il passe une seconde de plus dans l’enceinte de l’université. Son professeur de Nutrition lui avait collé un D sous prétexte que son devoir n’était pas assez approfondi ; bon ok, il l’avait fait la veille pour le lendemain, il avait zappé. Mais selon lui ça ne méritait pas si peu. Enfin, ce n’était pas comme s’il voulait être diététicien. Et puis, il s’en fichait bien pas mal des bonnes habitudes d’alimentation et des enzymes responsables de la dégradation des aliments. Lui, il mange aussi mal que tout américain de base, et il ne prend pas un gramme, merci le métabolisme de maman et surtout au sport. D’ailleurs, en parlant de sport, l’entrainement de baseball avait été un calvaire. L’entraineur était remonté contre eux, à cause de leur précédente défaite stupide, et il leur avait fait cracher les poumons, adieu l’entrainement technique, bonjour l’entrainement physique insupportable. Ses muscles le brulaient affreusement, mais il n’arrivait pas à en vouloir au coach de les avoir malmenés, car il savait que c’était pour les remotiver. D’autant plus qu’il refusait de laisser les Alphas leur voler la vedette. Les cheveux encore humides, en bataille, ils virevoltent au vent tandis qu’il progresse d’un pas sûr et dynamique. Son regard se porte finalement sur une silhouette qu’il reconnait un peu plus loin. Il s’agit de Nash. Nash c’est une fille super, qu’il apprécie, et qu’il a secourue une fois, empêchant un vieux pervers de s’en prendre à elle. Depuis, ils ont passé pas mal de temps ensemble, et il n’y a rien d’intéressé dans l’histoire. Brendan se comporte bien avec elle sans se poser de questions. Elle est belle, et très attirante en vue de la personne qu’elle est, mais Brendan n’a aucunement l’intention de se servir de son acte pour la mettre dans son lit. D’une il est en couple, et de deux, il a bien compris qu’il y a des gens avec qui il ne faut pas trop jouer, que ça serait ouvrir leurs blessures passées. Ca faisait un moment qu’il ne l’avait pas vue, alors il accéléra le pas, et l’interpella : « Hey Nash ! Attends-moi ! » Mais de façon surprenante, la jeune femme ne se retourna pas et ne pris même pas la peine de ralentir l’allure, pire elle semblait accélérer le pas pour ne pas avoir à le voir. Etonnant. Il resta un moment immobile se demandant bien ce qui avait pu se passer, mais soucieux qu’elle ait eu un problème, il se mit à courir et la rattrapa. Lui attrapant le bras pour la forcer à se retourner vers lui, il lui lança : « Hey ! Qu’est-ce qu’il y a ? Tu t’es levée du pied gauche aujourd’hui ? » Plaisanta-t-il sans se douter que le problème qu’elle rencontrait était lié à sa personne. Pourquoi l’avait-elle ignoré ainsi ? Il grimaça. Ce n’était peut-être pas le moment de plaisanter, alors il essaya d’en savoir plus, la lâchant et poursuivant : « Il s’est passé quelque chose aujourd’hui ? T’as des soucis ? Dis-moi ! » Il la questionnait sans relâche, mais ça ne ressemblait pas à la jeune fille de se comporter de la sorte avec lui. Il lui sourit, et lui passa la main sur la joue pour lui relever délicatement le visage : « Hey…c’est quoi cette tête ? » Dis-lui tout Nash, car il ne te lâchera pas de sitôt.

Le parking était loin d’être vide, et Brendan n’aimait pas franchement se donner en spectacle, à part quand il tenait une batte fermement dans ses mains ou qu’il faisait un sauvetage audacieux, ou encore qu’il s’apprêtait à lancer une balle sur le batteur d’en face. Les discussions sérieuses, il les préférait à l’abri des regards, dans son appartement, entre n’importe quels murs, dans une voiture, mais pas comme ça. Car les rumeurs vont vite et il est très difficile d’éteindre un feu qui s’est embrasé rapidement. Pour autant, il ne comprenait pas la réaction surréaliste de Nash qui le fuyait comme s’il avait la peste, comme s’il était invisible. Et une fois à sa hauteur, elle cracha une vérité à laquelle il était loin de s’attendre. Il resta interdit. Avait-il bien compris ? Il avait dû manquer un épisode car il ne comprenait pas pourquoi elle pensait soudainement qu’il était un problème : Il écarquilla les yeux : « Moi ? » Répéta-t-il comme pour être sûr. Il secouait d’ailleurs la tête d’incompréhension. Elle avait l’air sacrément remontée contre lui, et il se mordit machinalement la lèvre inférieure, réfléchissant un maximum afin de trouver la raison pour laquelle elle lui en voulait, mais il avait beau chercher, il ne trouvait pas de réponse à sa rancœur. Nash l’inquiétait. Aucune de ses attentions n’eut le mérite de la calmer, au contraire, il semblait que la colère lui montait plus il essayait de comprendre. Il secoua de nouveau la tête : « Je comprends pas, Nash… » Il était dans le flou le plus total, comme si on lui avait modifié la vue. Il n’avait jamais cessé de s’occuper d’elle comme il s’occupait de ses sœurs, il l’avait protégée, il faisait tout pour passer un tant soit peu de temps avec elle, et tout ce qu’il récoltait, c’était une explosion de véhémence. Sa moue d’incompréhension s’élargit face aux accusations de la belle demoiselle : « Quoi ?! Mais quel jeu ? De quoi tu parles ? » Et il voulut se défendre, avec les armes qu’il avait, sentant presque un coup foireux de la part de la fille du Doyen ou de rumeurs colportées à son sujet. « Nash, tu sais très bien que je t’aime beaucoup ! Pourquoi je jouerais avec toi ? » Il soupira. Il regarda aux alentours, certains s’étaient arrêtés de discuter et les toisaient du regard, et il détourna le regard de ces personnes pour le reporter sur le visage de la jeune Longstride. Il lui demanda d’ailleurs : « Tu vas me dire ce qu’il s’est passé pour que je puisse comprendre, ou tu vas m’en vouloir pour un truc que je n’ai pas fait ? » S’agaçait-il péniblement. Qui avait pu lui faire croire une chose pareille ? Et pourquoi lui faire du mal inutilement ? La journée difficile se poursuivait…

Il avait tellement de mal à comprendre ce qui se passait. Nash ne semblait pas seulement en colère, elle semblait croire qu'il essayait de sauver les meubles, qu'il feignait l'ignorance alors qu'il était loin de le faire, il avait l'air aussi paumé que dans le désert du Sahara. Ou alors, il était dans le désert du Sahara et avait une hallucination. Le regard de Nash n'avait rien de ce joli regard doux dont elle usait d'habitude, cette fois, elle était furieuse et ses yeux noirs comme l'ébène fusillaient Brendan avec force. Il ne savait pas. Non. Et il ne savait plus comment le lui faire comprendre. Il soupira bruyamment: « Enfin Nash, tu crois vraiment que je me ferais chier à te demander si je savais pourquoi du jour au lendemain tu me fais la gueule ? » Il s’ébouriffa machinalement les cheveux, et finit par arriver à une conclusion un peu simple, mais plausible. Si bien qu’il ne tarda pas à essayer de savoir s’il était dans le vrai : « C’est parce qu’on s’est pas vus depuis un moment ? » Non elle ne pouvait pas se mettre dans ces états pour ça, elle avait son numéro, si elle avait voulu le voir, elle l’aurait appelé. Les conclusions hâtives de Brendan ne le satisfaisaient pas, et Nash elle, ne semblait même pas croire qu’il tenait à elle, et là son esprit s’illuminait un peu plus, mais son visage questionnait encore par des grimaces soucieuses le doux visage abimé par la colère de la petite brune. « Comment ça c’est faux ?! Tu crois quand même pas que je dis ça pour te faire plaisir ?! Ou que je me paie ta tête ?! » Il croyait pourtant qu’entre eux le courant passait bien, et qu’elle savait qu’elle pouvait compter sur lui, que même si elle ne l’avait pas toujours apprécié, qu’il avait vu en elle un être fragile, et son côté protecteur et familial était ressorti au grand jour, laissant de côté le comportement du garçon imbécile qu’il adoptait avec ses amis. En parlant d’amis, elle fit une révélation qui résolvait le problème. Elle avait entendu ses potes lancer des rumeurs infondées sur ses agissements. Parce qu’ils ne comprenaient pas pourquoi il s’était pris d’affection pour elle, parce qu’ils croyaient tous que le coureur de jupons en avait assez de sa copine chieuse et qu’il voulait à nouveau profiter de la vie comme tout jeune de son âge. Mais ce n’était pas le cas. Il eut un petit rire nerveux et lança : « Tu vas quand même pas croire tout ce qu’ils disent ! Tu le sais que la moitié du temps ils ne disent que des conneries ! Ils sont jaloux c’est tout ! Et puis d’abord qu’est-ce qu’ils ont dit ? » Mais il apparaissait tellement virulent, par étonnement qu’elle puisse croire à de telles sornettes, qu’il finit par s’en rendre compte, et alors il chercha à s’adoucir, en essayant de croiser son regard et plus posément, de façon douce et amicale, il essaya de la rassurer : « Nash, j’ai toujours été honnête avec toi. T’es une fille vraiment sympa, mais faut que tu apprennes à te faire confiance et à la donner aux autres. Pas tout le monde est pareil c’est vrai, mais si quelqu’un veut te faire du mal, alors je serais là pour te défendre et te soutenir. » Il voulait la faire sourire, et il avança sa main en direction du visage de la petite brune dessinant de son doigt un sourire sur les lèvres de l’inquiétée du jour. « Allez change d’expression, t’es beaucoup mieux quand tu souris ! » Il pensait déjà à détendre l’atmosphère, du Brendan tout craché.

Il ne savait plus quoi dire. Elle l’apparentait à tous ces gars susceptibles de la faire souffrir et il n’aimait pas ça. Avec elle, il avait toujours été intègre. Alors certes, elle avait vécu un cas épineux avec son père car elle lui avait fait confiance et qu’il l’avait en réalité dupée, mais Brendan n’était pas ce genre-là. Quand il décidait de s’amuser avec une fille, c’était réciproque. Il ne prenait personne à parti, et n’avait peut-être probablement jamais fait de mal à une femme, si on omettait sa copine actuelle avec qui il passait son temps à se disputer, mais dont il était fou, c’est elle qui le rend dingue. Avec Nash, c’était différent, il la considérait comme une sœur, comme la fille en détresse qu’il faut protéger pour ne pas qu’elle fiche sa vie en l’air. Il voyait bien qu’elle avait besoin d’une épaule sur laquelle pleurer à ses heures, quelqu’un à prendre dans ses bras pour se rassurer, et il était prêt à être cette personne pour elle, mais il fallait qu’elle lui fasse confiance et qu’elle ne s’arrête pas à la moindre rumeur, car sinon il ne pourrait rien pour elle. Alors il leva les yeux au ciel, et rétorqua un peu vexé : « Eh bah, je savais pas que tu me voyais de cette façon, ça fait plaisir à entendre… » Ironique au possible, il détourna les yeux momentanément comme s’il boudait. Il n’aurait jamais cru devoir se justifier devant elle. Il avait toujours agi en son âme et conscience, et il ne tenait même pas à lui rappeler qu’il avait été le seul à intervenir pour elle, car c’était puéril. A sa petite tentative de la faire esquisser un sourire, il n’obtint qu’une maigre simagrée, mais c’était déjà un bon début, si bien qu’il insista en imitant un sourire forcé en serrant les dents. « C’est presque ça ! » Elle essayait de lui confier ce que ses potes avaient pu dire, mais il avait déjà sa petite idée là-dessus. Il se promettait de faire en sorte de dire des conneries quand ils étaient sûrs d’être seul, car il en avait marre de passer après et de devoir recoller les morceaux. Nash finit par lui dire ce qu’elle avait entendu, et il avait vu juste : ils étaient intimement convaincus qu’il était intéressé et elle aussi à présent. Il secoua la tête, et commença à se justifier une énième fois : « Franchement, si j’avais voulu coucher avec toi, j’aurais pas agi de la sorte. Je t’aurais fait du rentre-dedans, ce qu’il me semble pas avoir fait. Et puis, tu sais que j’ai une copine… » Et en deux ans, il ne l’avait pas trompée une seule fois, même si parfois il avait bien envie de voir autre chose. Mais lui faire du mal n’était pas dans ses principes. « Je te forcerais pas à me croire Nash, je veux juste que tu me fasses confiance… » Et il était on ne peut plus sincère, une fois de plus.

Brendan comprenait qu’elle puisse craindre le moindre sale coup. Après tout, elle avait une histoire assez atypique. Son père était directement impliqué dans le décès de la mère de la jeune Longstride et la jeune femme avait dû encaisser une double sentence. D’autant plus qu’elle aurait bien raison de se méfier de n’importe quel bêta. Ils étaient des hommes à femmes, de vrais Don Juans des temps modernes, et Brendan faisait bien partie de ceux-là même s’il semblait s’être calmé depuis deux ans, mais la situation menaçait de s’inverser tant il ne supportait pas la vie de couple. Ce qu’il ne comprenait pas, c’est qu’elle puisse mal interpréter ses propos car il avait toujours été aussi limpide comme de l’eau de roche. Quand il voulait une fille pour ses attributs, il ne cherchait pas midi à quatorze heures. Mais elle semblait le comprendre grâce à son plaidoyer, et Nash s’excusa franchement, comme honteuse de sa scène, mais ça ne fit que provoquer un éclat de rire chez le cadet des Stevenson, qui ricana franchement : « T’en fais pas Nash, c’est déjà oublié ! » Si elle avait été un gars, elle aurait probablement reçu une bonne grosse claque amicale. Il lui releva le menton et en lui souriant presque trop, il lui ordonna : « Et maintenant tu vas me faire le plaisir d’arrêter de faire une mine d’enterrement et de sourire toute la journée ! C’est tout ce que je te demande pour te faire pardonner ! C’est pas dur, non ? » Il ne savait pas ce qu’elle avait prévu pour le reste de la journée, mais il était peut-être temps de l’embarquer pour faire un tour et lui prouver qu’il était de bonne foi. La jeune femme lui assurait avoir confiance en lui. Et s’il n’était pas sûr que ce soit véritablement le cas, il était bel et bien motivé à ce que ça devienne une confiance aveugle. Elle avait ce regard de biche qui devait en faire fondre plus d’un. Brendan n’était pas non plus insensible à son charme, et ça devait parfois transparaitre dans ses gestes, car le jeune homme ne se gêna pas pour lui entourer la taille de son bras, et de lui souffler : « Alors tu veux faire quoi de l’après-midi ? Y a un truc qui te tente ? Parce que maintenant que t’es là, je vais pas te laisser filer comme une voleuse ! » Autant profiter de la journée.