FLASHBACK » Megan n'avait que dix ans. Assise sur son lit, elle attendait le moment où sa mère viendrait lui dire bonne nuit après l'avoir forcé à faire sa prière. Mais ce soir, ça ne se passerait pas comme ça. Megan était épuisée de toutes ces idioties, de toutes ces bêtises de fanatiques dépressifs. Elle n'a jamais imaginé une seule seconde que Dieu existait. S'il était si bon, pourquoi est-ce que les guerres existent ? La faim dans le monde ? Les maladies ? Sa mère lui avait donné de multiples raisons quand la petite Megan avait osé poser ces questions. Elle lui disait: « C'est une épreuve que nous envoie Dieu pour nos permettre de lui prouver que nous méritons tous sa miséricorde et son amour. » ou alors « Dieu supprime les plus faibles pour le garder que les plus forts comme nous, ma chérie. ». Conneries !
Megan brossait les cheveux de sa poupée de porcelaine qu'elle avait appelé Milie. Elle l'avait eu à son baptême. Elle l'adorait et aimait la considérer comme sa fille. Partout où elle allait, il la lui fallait. Elle la posa délicatement sur son lit et alla se placer à sa fenêtre. Les Marston n'était pas riche, c'était faux. Mais le nouveau mari de sa mère, si. Il les couvrait de cadeaux, ce qui ne plaisait pas du tout à Samantha Marston. Souvent, elle refusait que sa fille joue avec les jouets qu'il lui avait offert. Encore un de ces critères religieux débiles !
Megan entendit sa mère monter les escaliers. Elle se rua dans son lit et fit semblant de dormir. Au diable la prière ! Ce n'était que des bêtises ! Elle ferma les yeux sans trop forcer. On aurait vraiment cru qu'elle dormait. Sa mère ouvrit la porte, alluma la lumière et ordonna: « Megan, debout. Je sais que tu ne dors pas. Fais ta prière et mets-toi au lit. ». La petite fille restait allongée sans bouger. Sa mère s'agaça, fit le tour du lit et lui arracha sa poupée des bras. Megan ouvrit immédiatement les yeux: « Non maman, ma poupée ! Donne-la moi, s'il te plaît ! ». Sa mère, furieuse de voir qu'elle avait essayé de la dupé, ouvrit la fenêtre et tendit la poupée en porcelaine de Mega au dessus du vide: « Prie, maintenant ! Prie Megan ! Demande pardon au Seigneur ! ». Megan, en pleurs, s'agenouilla et commença à prier à voix haute. Elle pria encore et encore jusqu'à ce que ses genoux lui fasse mal. Sa mère la releva par le bras, le serrant très fort: « Ecoute-moi bien, si jamais tu recommences ce petit cinéma, tu peux dire au revoir à ta poupée et je t'enferme jour et nuit dans ta chambre, est-ce que c'est clair ?! ». Megan s'approcha de sa mère en pleurs et tenta de la câliner mais elle la repoussa et jeta sa poupée par la fenêtre. Dans un silence plombant, Megan l'entendit se briser au sol. La petite cessa de pleurer et regarda sa mère. Elle dit d'un ton très calme: « Maman, ce ne sont que des bêtises tout ça. Tu crois en Dieu parce que tu n'as plus personne en qui croire. Tu ne crois même pas en Kyle alors que tu t'es mariée avec lui. Tu es devenue complètement folle et apeurée. Tu ne crois pas en Dieu mais tu te forces à le faire de peur que tu ailles encore plus mal. ». Sa mère la gifla et quitta la chambre. Megan se souviendra toute sa vie de cette claque qui lui avait révélée qu'elle avait dit vrai.



FLASHBACK » Assise dans le train qui l'emmenait loin, très loin du domicile familial, Megan se repasser les dix-huit dernière années de sa vie.  Et ce n'était pas vraiment très glorieux, elle l'avouait. Pour commencer, la jeune femme n'avait jamais connu son père. Dès qu'il avait appris la grossesse de Samantha Marston - sa femme - et qu'en plus elle attendait une petite fille, il était parti comme un lâche et n'avait plus jamais donné signe de vie. Megan en avait beaucoup souffert à l'école primaire et avait toujours cherché à le connaître. Ou du moins, jusqu'à ce qu'elle soit adolescente. Après, elle a commencé à se faire une raison et à oublier l'homme qui avait dû, depuis toutes ses années, l'oublier elle et sa mère.
Megan avait vécu une enfance relativement maussade, avec une mère catholique pratiquante qui la forçait à aller à l'église et à prier tous les soirs avant de dormir. Cette ferveur religieuse lui avait créée une drôle de réputation à l'école primaire, ainsi qu'au collège et au lycée. Pour résumer, elle était connue comme le loup blanc dans sa petite ville natale, à quatre-vingt kilomètres de Little Rock, Arkansas, à cause de sa mère et de son catholicisme extrémiste. Megan, quant à elle, a toujours pensé que la religion n'était qu'un ramassis de conneries et que seules les personnes les plus désespérées tombaient dedans afin de se trouver une raison de rester en vie et de ne pas sauter d'un immeuble ou de se couper les veines. La jeune fille, bien que tolérante, en a beaucoup souffert et la religion restera un cauchemar, un frein à la liberté pour elle. Et quand la jeune femme a découvert son homosexualité, se fut la fin du peu de relation mère-fille qu'elles entretenaient. Mais Megan n'a jamais voulu le cacher son penchant pour la gente féminine.
Megan n'a jamais vraiment apprécié sa famille. Sa mère, Samantha Marston, s'est mariée quand la jeune femme avait à peine deux ans, imposant donc à ce « nouveau père », un statut d'éducateur. En effet, il a toujours considéré Megan comme sa fille. Chose qu'elle n'a jamais supporté puisque pour elle, elle est né sans père et que ça restera ainsi. La famille Marston connut donc bon nombre de conflits, d'hypocrisie que Megan n'a jamais réellement compris. Les repas de famille se passaient dans les cris, ainsi que toutes les autres occasions de fêtes comme les mariages et les baptêmes. Les tendances extrémistes de Samantha Marston étaient toujours sources de problèmes. Les grands-parents de Megan ne comprenaient pas les techniques d'éducation de leur fille et passaient leur temps à la sermonner. Ses grand-parents ... Megan les adorait. Mais il y a quatre ans, un accident de la route leur a enlevé la vie. Un nouveau coup dur pour la jeune femme qui la réveilla et la fit commencer à prendre conscience que sa mère l'empêchait de vivre correctement sa vie d'adolescente. Elle a donc rompu tout contact avec sa mère et s'est installée chez son oncle le temps de finir le lycée. Son oncle était la pire ordure que la Terre n'ait jamais porté. Arrogant, alcoolique, pervers mais il s'est toujours bien comporté avec Megan, la laissant faire sa vie, lui donnant un peu d'argent et lui louant une petite chambre sous son toit. Elle avait pu correctement finir l'école. Et là, elle était dans le train pour l'université de l'Ohio.
Megan regardait défiler le paysage, se sentant peu à peu revivre. Plus loin elle était de sa famille, mieux elle se portait. Elle allait pouvoir prendre un nouveau départ et se construire une nouvelle vie, sa propre vie sans avoir de comptes à rendre. Elle allait pouvoir être elle-même, être libre comme jamais elle ne l'a été.