Solal ∞ Sevan

Allonger sur mon lit, je tente de faire de mon mieux pour essayer de retrouver une respiration normale. Depuis ce matin, je ne me sens pas bien. J’ai cette douleur dans la poitrine depuis quelques jours. Je pensais que c’était normal. Enfin. Pas totalement normal, mais vu ma pathologie, je pensais que je n’avais pas vraiment de souci à me faire. Je pensais que ça allait passer. Mais en me levant ce matin j’ai juste pu constater que c’était bien pire. Pourtant je me suis lever comme si de rien était. Andy était à l’appartement et je ne voulais pas qu’il s’inquiète. J’ai pris mon petit déjeuner avec lui et quand il m’a demandé ce que je comptais faire de ma journée, je dois avouer que j’ai un peu commencé à prendre peur. Je n’arrivais même pas à me tenir droit sur ma chaise, alors je me voyais mal partir en vadrouille avec lui pour la journée. Heureusement il avait déjà quelque chose de prévu avec des gars de sa sororité. Je l’ai laissé partir, le sourire aux lèvres. Il avait à peine passé la porte que je me suis écrouler dans la cuisine. J’ai horriblement mal à la poitrine. C’est juste l’horreur. Je me suis traîner jusqu’à mon lit et maintenant j’ai juste le sentiment que je vais mourir. J’ai pris mes cachets, mais je sais que cela ne va pas faire effet de suite. Je sais aussi que ce ne sera jamais assez suffisant pour calmer totalement la douleur. Je ferme les yeux et tente de me concentrer sur ma respiration. Plus les minutes passent, moins je me sens bien. Alors après une nouvelle douleur un peu plus vive que les autres, je me décide à faire quelque chose. Sans réfléchir plus longtemps, j’attrape mon téléphone et cherche le numéro de Solal. Quelques sonneries et mon ami finis par décrocher. « Hé mec… Je te dérange ? Non… Ecoute… Tu pourrais venir… » J’ai presque du mal à parler d’un seul coup. Je me concentre sur la voix de Solal à l’autre bout du fil. « Solal je me sens pas bien… Pas bien du tout. » Il change de ton en moins de deux secondes et me promets d’être là le plus rapidement possible. Je ne vais pas le cacher cela me soulage.

Solal est le plan cul d’Andy. Enfin je sais pas trop ce qu’ils sont tous les deux, mais je sais qu’ils prennent du bon temps ensemble. J’ai malheureusement parfois le droit à des concerts de gémissements en pleine nuit. Enfin. Je l’ai connu bien avant cela. On discutait, nos histoires passées sont arrivé dans la conversation et on c’est rapidement rendu compte que l’on avait tous les deux fréquenter un de ses foyers glauques pour orphelins. Nous n’avons clairement pas les mêmes histoires, mais à la suite de cela Solal m’as tout de suite pris sous son aile. Un jour où tout allait mal et où je venais encore une fois de me prendre la tête avec Andy, j’ai tout raconté à Solal. Enfin pas tout, mais il sait que je suis malade. J’avais besoin de le dire à quelqu’un, mais je ne voulais pas que ce soit Andy. Alors je me suis tourner vers le mécheux et je ne regrette pas mon choix. Il garde le secret et aujourd’hui je pense que son aide va être précieuse. Je garde mon téléphone à côté de moi et guette le moindre bruit dans l’appartement.

Mon ami avait dit vrai, quelques minutes plus tard, j’entends la porte de l’appartement s’ouvrir. Je n’ai même pas la force de crier son nom et espère juste qu’il viendra ici tout de suite. Je l’entends tourner un peu dans le salon et finalement il arrive dans le couloir et pousse la porte de ma chambre. Je me tourne un peu et lui offre un faible sourire. « Hey… » J’essaye de me relever, mais c’est pas vraiment ça. « Je te sauterais bien dans les bras, mais… C’est pas vraiment le top de la forme. » Je soupire un peu. « Merci d’être venu. »

BAM. BAM. BAM. C'était à peu près l'effet que ses coups répétés à ma porte me firent, tandis qu'il les faisait suivre d'un "Mec ? Mec ! T'es seul ?" avant qu'il ne recommence. J'ouvris un œil pour fixer mon réveil qui m'indiquait 08:00 AM, même un mince filet de lumière passait à travers mes volets pour me dire que l'aube s'étirait déjà à l'horizon depuis plusieurs heures. Poussant un juron dans ma barbe naissante, je plaçais un oreiller par-dessus ma tête dans l'espoir d'atténuer les bruits, après avoir tâté les draps à côté de moi, on ne sait jamais que mon rêve était vrai et qu'Andy y était. Mais non, j'étais seul et impossible d'arrêter de l'entendre, ça ne marchait pas. "Ouais ! et j'aimerais bien dormir, j'suis pas une poule !" Et cela fonctionna encore moins, car le réveil matin sur patte ouvrit la porte à la volée et la referma derrière lui pour venir s'asseoir sur le lit, à hauteur de ma tête. "Mec ! Je me suis fait une de ces bombes hier soir !" s'exclama l'autre à m'en donner la migraine, heureusement qu'il n'était pas trop tôt, ou je crois que je l'aurais reçu avec mon poing dans la gueule, frère ou pas frère. "Content pour toi." grognais-je avec mauvaise humeur, mais cela ne l'arrêta pas. "Vanessa. Blonde, et un de ces corps ! C'est pas un de tes pseudos plan cul ?" Pseudo, parce que je n'étais que gay, et que je laissais au moins courir le bruit que j'étais bi pour une question de carrière professionnelle. Une fois lancé, on en reparlerait, d'ici là... Le fait que je sois bi, ou même gay, ne dérangeait pas mes frères à priori, puisque je n'allais pas les mater sous la douche, quelque soit leurs préférences d'ailleurs, et que le type à côté de moi par exemple, me faisait plus penser à un frangin à se pointer comme il le faisait. "Ça me dit rien." Et lui en tout cas n'en avait strictement rien à faire. Il avait totalement confiance en lui, se sentait parfaitement hétéro et au clair avec ses penchants sexuels. On pouvait donc parler d'une amitié sans l'ombre d'une ambiguïté et cela m'allait totalement. Ou peut-être pas ce matin, parce que j'aurais adoré qu'il ne soit pas aussi à l'aise dans la chambre d'un mec gay qui ne portait que... ben rien en fait.

Je le laissais donc parler, répondant par monosyllabe à l'occasion sans l'interrompre, continuant à somnoler dans l'espoir qu'il finirait par partir, mais rien, définitivement rien. Il restait là, continuait tranquillement sans même sembler remarquer qu'il m'ennuyait. Mais j'aurais mis ma main à couper qu'il le savait très bien et n'attendait que le moment où j'allais perdre patience et lui dire de foutre le camp de ma chambre. Sauf que ce fut la sonnerie du téléphone qui termina de me réveiller. Bordel ! Ils se donnaient le mot ce matin ! J'avais dormi 5h ! Cinq putain d'heures avec un entrainement dans les pattes et la fête d'anniversaire de l'une de mes sœurs. "Ouais ?" dis-je en décrochant, pour entendre la voix de Sevan à l'autre bout du fil, me demandant s'il me dérangeait. "Non ça fait un moment que je suis en train de me réveiller. Ça va toi ?" Non. La réponse qui me fit me redresser légèrement dans mon lit et retomber le drap. Je sortis de mon lit sans même faire attention à ma nudité, venant passer un boxer propre tout en continuant à parler. "Venir ? T'as besoin de parler ? Il se passe quoi ?" demandais-je pour savoir ce qu'il se passait, d'un ton dégagé, tout en m'étirant, commençant à passer tranquillement un pantalon. Sauf que sa réponse n'eut d'autres effets que de m'inquiéter. "OK, j'arrive. T'es chez toi ? J'suis là le plus vite possible."

Je raccrochais, glissant mon portable dans la poche arrière et rapidement un tee-shirt, avant d'enfiler des baskets pour finalement rejoindre le parking, grimper dans ma voiture et prendre la route en direction de l'appartement d'Andy et Sevan. Je connaissais le chemin presque par cœur à force de m'y rendre, c'était presque un automatisme, sauf que je ne venais pas voir mon amant régulier, mais un ami à qui j'avais promis d'être là s'il appelait, pire encore depuis que je savais qu'il était malade. Le pire secret du monde, mais il voulait que cela reste ainsi, que personne ne soit au courant, alors je n'en disais rien. Après tout, c'était presque un membre de la famille, un gamin ayant grandi en foyer, un cousin éloigné de Dublin. Je conduisais un peu trop vite, beaucoup trop vite, mais je savais où était les radars et je ralentissais seulement quand il fallait pour arriver rapidement chez eux. Garé comme un connard, j'allais directement à leur appartement, ouvrant la porte qui n'était pas verrouillée... "Sev ? " Pas de réponse et ce n'était pas pour me rassurer, je regardais, tournais, cherchais, jusqu'à parvenir à sa chambre. Il était là, tenta de sourire, de se redresser, d'être drôle aussi, mais l'effet final se discutait. "Normal mec... t'as une tête à faire peur." Je traversais donc la pièce après lui avoir dit avec honnêteté la vérité. Il n'allait pas bien et en avait vraiment la tête. "Alors on fait quoi ? T'as des médocs à prendre ? Je t'emmène à l'hôpital tout de suite, ou tout de suite ?" dis-je avec un petit sourire en coin pour le détendre un peu, ou peut-être moi, parce que je m'inquiétais pour lui à le voir ainsi.

Solal ∞ Sevan

Je me souviendrais toujours du jour où j’ai été diagnostiqué. Je me souviens parfaitement de la douleur qui m’avait foudroyé sur ce terrain de baseball. On avait perdu le premier match de l’année à cause de moi et depuis l’équipe m’en veux toujours. Ils ne disent rien, mais je sais qu’il me tienne responsable de cet échec. Je n’avais jamais voulu cela, mais voilà… Je suis malade. Gamin j’étais toujours en pleine forme. Andréas s’attrapait toutes les maladies qui traînaient à l’école et moi je m’en sortais toujours avec uniquement un petit rhume. J’avais une santé de fer. J’étais un vrai sportif. Puis il a fallut que je fasse ce malaise et la bombe est tombé. Une malformation cardiaque. Merde. J’ai vingt et un an et j’ai le cœur d’un vieil homme. Depuis, j’ai l’impression que les symptômes me tombe tous dessus d’un seul coup. Maintenant je me rends compte que je m’essouffle très rapidement, que le moindre effort me fatigue tellement que je dois rester allonger un bon moment après cela. J’ai l’impression que mon corps est en train de céder petit à petit. Cela fait deux ans et je ne vais pas le cacher, je n’ai pas envie de mourir. Je n’ai pas envie de laisser la maladie gagner du terrain, mais comme me l’as dit mon médecin il y a peu, sans greffe je m’en sortirais jamais. Autant dire qu’une greffe de cœur n’est pas quelque chose d’anodin et que les donneurs ne cours pas les rues malheureusement. Pour le moment, je ne suis pas assez en sale état pour prétendre être en tête de liste. Alors j’attends et je me gave de médicaments. J’essaye de faire attention à ce que je fais aussi. Mais hier j’ai passé la nuit avec Naël et on à pas vraiment jouer au monopoly tous les deux. Je me sentais déjà pas très bien en arrivant chez lui, mais j’ai essayé de passer outre. En rentrant chez moi quelques heures après, je me suis senti encore plus mal et ce matin c’est juste l’horreur.

Je crois que j’ai un peu trop attendu. J’aurais dû aller chez le médecin bien avant. Bien avant de me retrouver clouer dans mon lit, sans même pouvoir bouger le bras. J’ai attendu qu’Andy soit parti pour décider de faire quelque chose. Je ne peux même pas bouger alors je ne prends même pas l’idée de prendre ma voiture pour aller jusqu’à l’hôpital. Je n’ai pas vraiment envie d’appeler une ambulance non plus, alors avant tout j’appelle Solal. Il a promis de garder mon secret. Il est au courant de tout. Enfin, il sait que je suis malade et il m’a toujours dit de l’appeler si j’avais besoin de lui. J’entends bien que je le dérange, il a pas l’air de très bonne humeur, mais quand je lui dis que je ne me sens pas bien, il réagit tout de suite. Je m’en veux un peu. Si ça se trouve il avait quelque chose de prévu pour sa journée. Il avait peut être envie d’être tranquille et je viens l’embêter avec mes soucis de santé. Quel idiot, j’aurais dû appeler une ambulance. Une nouvelle douleur dans la poitrine me fait tout de même comprendre que je préfère avoir Solal à mes côtés. Faites qu’il arrive avant que je ne tourne de l’œil. Parce que je sens bien que je vais finir par valser.

Quelques minutes plus tard, j’entends la voix de mon ami résonner dans l’appartement. Il arrive rapidement dans ma chambre et je tente de le rassurer, mais il me fait rapidement savoir que j’ai une sale tête. Une grimace se dessine sur mon visage alors que je tente de me redresser pour m’asseoir sur mon lit. J’ai la tête qui tourne et puis il y a cette douleur qui ne cesse de me comprimer la poitrine. C’est juste une horreur. Je relève les yeux vers Solal qui a l’air inquiet d’un coup. « J’ai pris mes cachets, mais ça va pas mieux… » J’ai la voix rauque et fatiguée. On dirait un zombie. J’ai pas l’habitude d’être comme cela. « J’ai l’impression que je vais m’écrouler Sol… » Je veux pas l’effrayer, mais je préfère le prévenir tout de même. Il m’aide à me relever et je m’assois sur le bord du lit. Ca tangue un peu, mais j’arrive finalement à me mettre sur mes pieds. Je peux m’empêcher de porter une main à ma poitrine. Je me suis jamais senti aussi mal pour dire vrai. « Je veux pas mourir… » C’est sorti tout seul. C’est incroyablement con je le sais, mais c’est sorti parce que j’ai vraiment la trouille. J’ai peur de lui claquer sur les bras d’un coup comme ça, sans prévenir.