Après avoir lancé une telle invective, j’arborai un sourire fier. Ma copine me tuerait si elle me trouvait ici en compagnie de Cloud. Elle qui ne supportait déjà pas que je côtoie d’autres filles qu’elle, aurait bien tapé une crise. Elle en devenait paranoïaque. Ca faisait pourtant bien deux ans que je n’avais pas eu une seule aventure. Elle me suffisait amplement. Enfin, c’est ce que j’essayais de me dire en fait. Je ne suis pas très convaincant dans ce rôle, surtout pas quand une déesse dans le genre de Cloud exécute un plongeon dans son petit maillot rouge qui lui va à ravir, digne d’alerte à Malibu. Je ne me gênais pas pour rincer l’œil, mon père dirait que nous avons une paire d’yeux, c’est pour s’en servir. Ca n’a jamais fait de mal à personne. Elle laissait planer le doute quant à sa présence ici, et je n’hésitais pas à nager en sa direction afin d’avoir une réponse plus complète, remplie de certitudes. « J’aime pas les peut-être, je veux une vraie réponse » Dis-je une fois à sa hauteur. Et puis je n’hésite pas à plaisanter également : « Tu t’apprêtes à reprendre le rôle de Pamela Anderson dans Alerte à Malibu avec ce maillot ? » Je lui tournais autour, pour l’ennuyer, pour m’amuser. Il n’était pas question de conflit Alpha-Bêta avec elle. J’aimais bien trainer avec Cloud parce qu’elle était authentique. Je ne sais même plus ce qui a fait qu’on s’est tout de suite bien entendu, mais quand la connexion existe depuis le début, on ne peut foutre en l’air tout ça pour une rivalité sportive. Enfin, c’est ce que je veux bien croire. « Moi qui croyais être tout seul ce soir, t’as contrecarré mes plans. » avouai-je dans un petit sourire mutin. Cette fille me rendait fou. Le tout qu’elle formait rendait notre amitié ou appelez ça comme vous voulez, terriblement déstabilisante et intéressante à la fois.

Ca recommençait. Je lui tournais autour comme un vulgaire vautour prêt à fondre sur sa proie. J’étais en couple, et ma copine, je l’aimais. Elle a beau être chiante, toujours me faire des scènes pour pas grand-chose, il n’empêche que depuis deux ans, je suis quand même heureux. Oui, mais… pourquoi se contenter d’une quand on peut en avoir plusieurs ? Pourquoi s’imposer des restrictions à mon âge ? Je ne saurais même pas dire si j’imagine ma copine actuelle comme étant la future mère de mes enfants. J’ai 23 ans, j’ai encore le temps de profiter, non ? J’ai toujours l’impression d’être un paradoxe sans fin parce que je ne parviens plus à maitriser mes envies, et je me noie sous les tentations diverses qui perturbent grandement ma routine. Cloud fait partie de ces tentations-là. J’ai toujours l’impression que quoi qu’elle fasse, elle m’aguiche, elle cherche à me faire céder. Même ses taquineries ont une odeur infâme de drague dissimulée. « Vraiment ? C’est bizarre quand même que ton équipe n’en fasse pas autant ! Elles se croient trop fortes, j’imagine ? » Son rire me détendait, il avait une couleur particulière, résonnant dans l’établissement comme un écho mélodieux à mes oreilles. « J’aime bien quand tu ris, » avouais-je alors et je poursuivais ensuite : « Oui, une blondasse aux gros seins, mais la comparaison s’arrêtait au maillot, je te rassure ! » Moi aussi je riais franchement. Et puis, je remarquais que son regard était posé sur moi comme si elle me détaillait, alors ricanant je lâchais : « Qu’est-ce que tu regardes ? Tu m’épies ?! » Ca ne me posait pas de problème, je n’avais pas de problèmes de pudeur particulier. Surtout pas avec elle. D’autant plus qu’elle n’hésitait pas une seule seconde à user de qualificatifs appréciables. « L’hélicoptère ?! Non le squale ! Je vais t’attaquer quand tu y attendras le moins, jeune fille ! » Mais c’est elle qui me surprit en me sautant sur le dos et si je fis mine de me débattre comme un prédateur qu’on vient de capturer trop aisément, mes mains vinrent glisser sur les cuisses de mon Alpha préférée pour la réajuster et je me remis ensuite à nager, faisant office de transporteur. Je m’arrêtais ensuite momentanément, m’agrippant à un rebord, retournant la tête légèrement pour l’observer un moment, le visage fermé, comme pour lui faire comprendre que je n’avais aucune envie qu’elle parte. « Maintenant que tu es là petite fille, tu vas pas te faire la malle ! » Je me sentais bizarrement. Mes pensées contradictoires m’embrouillaient le cerveau. Je pensais à ma copine, à ce qu’elle avait prévu pour la soirée, et puis mon regard se portait sur Cloud, dans son petit maillot rouge, sa petite silhouette bien accrochée à mes épaules, et à d’autres choses.

« Toutes les Gammas ne sont pas des idiotes aux gros seins tu sais… Par contre elles sont bien les plus belles filles du campus ! Et pour ce qui est des Alphas, ne pas s’entrainer ça montre bien leur manque d’intelligence ! » Je lui souriais malicieusement. Les Gammas étaient pour la plupart mes amies, d’autres avaient trusté mon lit. Il était donc pour moi tout à fait naturel de les défendre. Et en plus, je taquinais Cloud qui semblait hilare, sans aucune raison apparente. Elle était peut-être bien mal à l’aise. Mais pourquoi ? J’avais tendance à oublier son jeune âge et également qu’elle n’avait peut-être pas l’habitude de ce genre de flirts particuliers. Cloud semblait être une fille mystérieuse au possible, et c’était ce qui faisait tout son charme. Plus ce petit côté de jeune insouciante aussi. Elle avait l’air parfois de vivre dans un autre monde, intangible, plus appréciable. Innocente au possible. « T’as tous les droits. » Attestai-je, bien avant de me rendre compte de la portée de mes propos. Elle pourrait me prendre au mot, et il y avait hélas des choses qu’elle ne pouvait réaliser. J’aurais peut-être dû modérer mes dires, mais il était trop tard pour revenir en arrière. D’autant plus que les plaisanteries semblaient l’emporter, et que tant qu’elles persistaient, j’étais à l’abri de tout faux-pas. « Je fais si vieux que ça ? Encore un peu et tu m’accuserais de pédophilie ! » Il n’y avait que quatre ans d’écart entre nous, c’était mince. Mais parfois, ça pèse un peu plus que lorsqu’on est adultes affirmés. A notre âge, on remarque tout de suite les différences d’âge. Parfois sur le plan de la maturité, parfois sur autre chose. Mais attendez, pourquoi étais-je en train de faire des plans sur la comète ? Cloud était une amie, il n’y avait pas de mal à être un peu plus âgé. Mais en fait, je ne maitrisais pas notre relation : je ne faisais que répondre à ses tentatives, et je ne m’en rendais même pas compte. Une ambiguïté s’installait, et je ne faisais rien pour l’estomper, bien au contraire, je l’attisais. Cloud m’envoutait comme on hypnose le plus influençable des êtres. Sentir son corps chaud tout contre le mien, dans l’eau tempérée de la piscine était grisant. Parfois, c’était comme si mon cœur s’arrêtait momentanément de battre, comme quand elle entoura mes hanches de ses jambes. Elle recherchait la proximité et m’incitait à en faire de même. Rien de prévu ce soir, disait-elle. Etait-ce une invitation ? Ce n’était pas correct vis-à-vis de ma copine, mais mon corps tout entier réclamait la jeune fille toujours bien agrippée à mon cou. Je ne savais quoi répondre. Et sans crier gare, mes lèvres traitresses laissèrent échapper des mots vicieux : « Moi non plus. » Je me mordais la lèvre inférieure, presque mal à l’aise par cette tension qui nous habitait. Cloud semblait frissonner, et je la questionnais, soucieux : « Tu as froid ? Y a ma serviette posée un peu plus loin si tu veux ! » Si c’était le cas, je la ferais sortir de l’eau en lui donnant ma serviette de bain pour ne pas qu’elle attrape mal.